Relation de mon pèlerinage…
Sommaire
Avant-propos
C’est quoi ce pèlerinage ?
C’est un pèlerinage bouddhiste qui retrace le chemin qu’avait emprunté le fondateur d’une secte bouddhiste, qui fait le tour de l’île de Shikoku (1200 km sans les temples additionnels qui font passer à 1400 km). Les puristes respectent toutes les traditions et vont même jusqu’à faire les 20 temples supplémentaires menant jusqu’à la tombe du mec, sur l’île principale.
Pourquoi tu as fait ce pèlerinage ?
Au départ j’étais dans l’optique de rester vivre au Japon. J’avais découvert presque par hasard ce pèlerinage il y a trois ans et j’ai eu envie de l’intercaler entre mes trois mois à apprendre le japonais à Yamasa et ma recherche d’emploi. En plus, tous les Japonais connaissent ce pèlerinage, et outre l’impression que ça laisse, ça montre une véritable envie de s’intégrer. Et puis j’aime marcher, et marcher seul me permet de réfléchir. C’était aussi un test d’endurance, comme un défi à la crevette que je suis.
Et tu faisais quoi dans chaque temple ?
Personnellement je ne faisais pas ce pèlerinage pour des raisons religieuses, donc la tradition je m’en contrecarrais un peu. J’avais juste un bâton et une veste traditionnels, et dans chaque temple je me purifiais les mains et la bouche (on quitte le monde humain), je faisais une prière personnelle (parfois un Je vous salue Marie aussi), et je laissais de temps en temps une feuille avec mon nom, mes coordonnées, mon âge et la date du jour. Il y a trois bâtiments en général, un dédié au fondateur de la secte, un autre plus grand « classique », et un troisième pour l’administratif et tamponner les carnets (mais je le faisais pas, tout comme les bougies et l’encens). Souvent le temple bouddhiste était plus loin voire (beaucoup) plus haut que le premier, donc je priais au premier. Ça ne change rien en soi pour moi, donc ça va.
Et tu dormais où ?
Les temples sont aussi chers que les hôtels et autres logements privés, et vu que je visais environ six semaines ça allait faire vraiment super cher, du coup je visais de dormir à l’extérieur dans mon super duvet autant que possible (abris, bancs, bus, école inusitée, etc.).
1er jour
- 08 avril 2013
- Temples 1 à 10
- 7h10 – 19h (36 km)
Juste avant mon départ, après avoir envoyé un email à la plupart de mes contacts (j’en ai oublié mais j’étais stressé et pressé, désolé !), je suis descendu manger ce que Chantal (la Taïwanaise qui aime m’écouter chanter) m’avait préparé : un karee udon. J’en ai mis un peu partout (vraiment pas pratiques, ces nouilles), dont un peu sur mon T-shirt « Elena » qui était déjà crade de toute façon. Je me rappelle que je l’avais déjà emporté il y a quatre quand pour grimper le Mt Fuji, et qu’il avait morflé lors du lavage à l’eau froide après… Setsu m’offre un truc indescriptible, genre de pendentif en plastique avec mon nom dessus en katakana, accompagné d’une baguette de pain et les kanji de mon prénom, à l’instar de ce qu’elle avait fait en attendant que Yamasa transmette le petit papier avec mon nom à mettre sur la porte. J’ai ensuite dit au revoir à tout le monde, et Chô-san (l’intendante chinoise) m’a proposé d’emmener à la gare vu le temps qu’il faisait (grand vent froid). Elle a insisté, alors j’y suis allé, et Setsu et Chantal m’ont sont également montées à bord. Adieux déchirants, refus de Chô-san que je lui fasse un bisou, mais promesse de sa part de faire des gyôza à ensemble à mon retour. Cool.
Le train a un peu de retard comme toujours à cette heure tardive, j’arrive à Nagoya où je trouve mon bus sans problème, et c’est parti mon kiki pour le bus de 23h. J’arrive quasiment pas à dormir, et je suis pas hyper frais le lendemain à 5h40 quand on arrive. Je vais à un konbini m’acheter du pain, du bacon et une carte de téléphone pour appeler par surprise Setsu, Charles et/ou Yui, et je prends un train pour Bandô.
J’en descends et vois dans la gare des oreillers sur les longs bancs de la salle d’attente. Si c’est ça que j’allais avoir, c’était bath. Je me dirige vers le Temple 1, quand j’entends une grosse voix me demander si je suis un pèlerin et si c’est la première fois. Oui, oui. « Entre, je vais te faire un café« . Dis donc, mon premier o-settai ! L’homme est un fumeur de 66 ans qui accueille les pèlerins dans son tout petit resto. Il me dit que le magasin pour acheter l’équipement n’ouvre qu’à 7h, donc j’ai 45 minutes à attendre en blablatant avec lui autant que j’arrive à le comprendre. Arrive ensuite un Japonais de Nagoya et de 40 ans, Fujii-san, qui fait le pèlerinage pour la première fois aussi. On va tous les deux au magasin, j’achète un bâton (le plus léger) et une veste blanche, un guide pourri (alors qu’il y en avait un parfait à côté), des fiches pour laisser une trace de mon passage à divers endroits, et un poncho. Pas de bouquin, d’encens, de cloche, de chapeau conique, de bougies, etc. Je fais pas dans le traditionnel.
On va au premier temple, on fait les gestes rituels (Fujii-san me donne de l’encens et une bougie pour cette première fois), on prie chacun des trucs perso (et pas les sutras qu’il faudrait réciter), et c’est parti pour le Temple 2, pareil jusqu’au Temple 9. En cours de chemin, on aura reçu plein de o-settai. Probablement parce qu’on attire l’œil, couple improbable, parce que je suis jeune, français, que je parle japonais, et que Fujii-san vante mes mérites à qui veut l’entendre. J’ai appris plus tard que le 8 avril est une date particulière pour les bouddhistes, donc ça a peut-être joué, tout comme le fait que c’est le début du pèlerinage (pour encourager, genre). On a eu du thé sucré (plus une bouteille entière chacun alors que les autres non !), du thé vert, du jus d’orange, des snacks salés et sucrés, 100 ¥ chacun (une très vieille femme qui est descendue de son vélo à notre approche, nous a donné l’argent, a prié et est repartie), un onigiri avec nos nouilles le midi (Fujii-san avait rien à manger donc resto), plusieurs petits sacs faits main, et deux mikan chacun (sorte d’orange ou clémentine). Je reste populaire, même chez les personnes âgées, qui sont nombreuses que ce soit chez les locaux ou les pèlerins…
Au Temple 9, Fujii-san était bien fatigué (je l’attendais de plus en plus au fur et à mesure que l’après-midi avançait), et j’ai croisé Max, un Néerlandais de 23 ans qui causait pas un mot de japonais et qui coulait continuer la route. J’ai fait mes adieux à Fujii-san en le remerciant beaucoup (j’avais préféré rester avec lui plutôt que d’aller au premier temple additionnel), et on en a chié pour grimper jusqu’au Temple 10.
Il avait acheté le super guide que j’avais oublié, un guide avec plein de logements gratuits en dehors des quelques dont je dispose. On cherche ensemble mais on n’est pas aidés par des locaux qui embrouillent Max qui décide d’aller voir d’un côté où c’était sûr qu’il n’y avait rien. J’ai continué le bon chemin et j’ai trouvé l’endroit qu’il cherchait. Je me suis donc arrêté à environ 3 km du Temple 11, à 19h et à la nuit bien tombante, dans un abri au bord de la route avec petit lavabo, sorte de comptoir en bois, lit en bois avec futon (confortable), et deux des quatre murs avec des vitres. Le truc parfait. J’ai pu me laver un minimum, j’ai mangé la moitié de mon bacon et de mon pain, une pomme et une orange, et au lit. Le vent était froid mais j’étais bien protégé et mon duvet est bien chaud.
2ème jour
- 09 avril 2013
- Temples 11 et 12
- 7h50 – 17h30 (16 km)
Je me suis levé sur les ordres de mon réveil à 7h ; le jour était bien levé et la journée rude. J’ai rejoint le Temple 11 et ai continué avec Zikon, on Néo-Zélandais super sympa de 27 ans, avec une nuque longue et plein d’envies de voyages, dont j’ai suivi le rythme toute la journée. On n’a fait que 16 km, mais en environ six heures, ça a grimpé à fond, c’était horrible. Mais on a beaucoup parlé, de ce qui nous importait à chacun (nos rapports avec le Japon, notre spiritualité), il m’a parlé de sa copine et moi de mes problèmes sentimentaux (tous), on avait vraiment une super relation. Il avait prévu le coup de la montagne et avait acheté des snacks et des fruits secs dans un supermarché la veille, et tout au long de la journée ces fruits secs ont été un don du ciel. Il m’a même laissé la fin du sachet, sachant que j’avais fini mes réserves de bouffe le midi.
Arrivés au Temple 12, épuisés et rejoints par un couple de jeunes Américains, on a procédé à une sorte d’acte rituel. Zikon a une histoire particulière avec sa nuque longue, et il nous a demandé d’être témoins et de couper ces quelques cheveux longs qui lui allaient pourtant bien. Il voulait les lancer depuis le haut de la montagne, mais c’était pas pratique, il a dû le faire depuis. C’était sympa comme moment. J’ai ensuite repéré un supermarché sur le chemin du lendemain, où je comptais faire le plein. Parce que ce soir-là, je n’aurais plus que les bons biscuits caloriques que j’avais acheté avant, et une mikan. J’ai dormi dans une sorte de cour en partie recouverte avec tables, chaises et bancs pour les pèlerins. Ouvert au vent, mais ça allait avec mon gros duvet épais sur le large table. En plus il y avait des toilettes et des lavabos à côté.
3ème jour
- 10 avril 2013
- Temples 13 à 17
- 7h15 – 18h30 (51 km)
Je pars seul à 7h15. Ça commence super raide pendant 30 minutes, mais vraiment raide genre la veille, et ensuite que de la descente. Je rejoins un vieux Japonais qui marche sans bâton et on passera toute la journée ensemble. Il parlait super vite en japonais et un peu en anglais, je comprenais pas tout ce qu’il disait, mais il parlait beaucoup (il avait plein de salive aux commissures des lèvres (bisous Delphine)) et semblait érudit et avoir beaucoup voyagé. Au Temple 13, je remarque une double ampoule sur mon petit doigt du pied gauche. Bon. Je prends une mikan en o-settai au temple, continue malgré la douleur post-opératoire et mange en marchant des biscuits que j’avais achetés sur le chemin.
Je devais m’arrêter un peu avant le Temple 17, mais il était super tôt et je pouvais encore avancer donc j’ai regardé le plan du Japonais (décidément, le mien est à chier) et décide d’un autre point de chute, après le Temple 17, au pied de la montagne qui s’annonce difficile en route pour le Temple 18. J’achète des fruits secs, du pain et du jambon dans un supermarché (très peu de place et il faut que ça se conserve), je vais au Temple 17 puis quitte mon compagnon qui s’arrêtait là.
Je devais en avoir pour une vingtaine de minutes pour faire les 2 km qui me séparaient de l’abri que j’avais choisi, mais le temps passait et passait. Pourtant j’étais sur le bon chemin, il y avait les flèches sur les poteaux. Je continue un peu et décide de m’arrêter pour boire et regarder mon plan. Je vois alors un pèlerin japonais et lui demande son plan. J’avais bien trop avancé et il me faudrait une bonne heure pour parvenir à mon but. Je me rappelle un autre abri plus loin, et il me dit qu’il est à 8 km. Bon, je peux le faire en deux petites heures facile, c’est parti.
Mon cul ! C’était à 17,5 km ! En plus j’ai perdu les flèches à un moment (qui avaient pris une route un poil plus courte), que j’avais retrouvées juste avant l’abri où j’ai fini par arriver. Juste avant le pont à côté duquel l’abri se trouvait, il y avait une pancarte annonçant un abri pour les pèlerins. Super. Sauf que j’ai d’abord pris pour un abri une sorte d’annexe sur le toit d’un particulier, crade, avec des vis et des planches, mais à l’abri. Mais j’avais pas envie de dégueulasser autant mon duvet, donc j’ai continué mon chemin et ai trouvé un super abri, avec une petite table et sièges, trois étroits petits bancs et des coussins. Il y avait une autre route (de 5 km de moins) qui était a priori dure, qui passait par les montagnes (sous-bois et montagnes magnifiques à Shikoku), mais j’y ai échappé en me tapant le centre-ville et la zone d’activités genre RN6 (Route 55).
Sinon, mon petit doigt a fait des siennes toute la journée, mais en fait son ongle avait créé une cloque de sang sur l’annulaire voisin (on dit ça pour les pieds ?). J’ai aucun problème au pied droit, quelques ampoules au pied gauche mais rien de bien méchant. Toujours pas de douche, et ce soir pas d’eau donc pieds sales. Mais je ne pue pas, a priori.
Ah, aussi sur la route j’ai vu »niku bukkake udon », je me suis marré. Si vous aussi, c’est bien. Sinon, tant pis/mieux. Google est votre ami. Et aussi, j’ai vécu ce jour-là pour la première fois un truc pas cool, c’est la volonté d’arriver avant un autre au logement, on sait jamais où l’autre va dormir et il y a pas cinquante trucs gratuits, donc c’est un peu le premier arrivé le premier servi. Pas glop.
4ème jour
- 11 avril 2013
- Temples 18 à 20
- 8h40 – 16h20 (24 km)
J’ai dit « fuck » à mon réveil et suis parti de mon abri à 8h40. Rien de spécial si ce n’est mon petit doigt (anciennement double ampoule sous le pied) qui me titille. Les distances sont longues, j’ai l’impression de ne pas avancer, et j’arrive à 3,5 km du Temple 20. Cool, c’est pas loin. J’ai mis une grosse heure. Horrible. Horrible. Pire que le Temple 12. En plus j’étais seul, il faisait un peu froid, je transpirais à fond (pas de douche depuis longtemps), le chemin était horrible avec de grosses marches, et en haut j’ai cru mourir de fatigue. En plus je remplis ma bouteille d’eau, mais le type à côté de qui je pissais me signale qu’elle est non potable (j’avais pas vu) et il me file de l’eau d’une jarre issue de sa voiture, sympa. J’étais donc ultra crevé, et je comptais dormir 4km après le temple suivant, lui-même à 6 km. Mais une fille me dit que c’est le même genre de chemin, donc j’abandonne cette idée et compte m’arrêter au premier abri venu.
J’ai mis un temps fou à faire les 2 km qui séparaient le temple de l’école abandonnée où je suis resté, dans une sorte de cour avec deux murs et pas trop de vent, sur deux demi-palettes (salut papa), le chemin était à chier, des pierres difformes et des escaliers à la con, de quoi couper plein d’envie et de faire mal aux genoux. J’ai demandé comment accéder à l’école à un type du hameau, qui m’a dit qu’il y avait un autre Français dans un abri proche. Un bon vrai Français qui a la soixantaine, un gros pif et une façon de parler et râler typiquement française (prénom Robert), qui s’était arrêté pour cause d’ampoules (moi j’en ai deux nouvelles et apparemment j’ai saigné dans le dos, faudra que je voie mon sac). Il a dormi sur le canapé qui était là Dieu sait pourquoi, à côté de la table et du banc hexagonal, confortable donc mais avec plein de vent (froid et en vallée). Moi j’avais pas autant de confort, mais j’avais presque pas froid. Je lui ai emprunté son guide pour regarder mes arrêts pour la suite, et je suis allé dormir tôt.
5ème jour
- 12 avril 2013
- Temples 21 à 23
- 9h – 18h (38 km)
J’ai dit « fuck » à mon réveil et me suis levé vers 8h de mon abri inconfortable. Heureusement qu’il y avait des toilettes parce que j’ai visité le trône pour la première fois depuis 6 jours, je commençais à m’inquiéter. J’avais du PQ mais c’étaient des toilettes japonaises, donc pas pratiques (en plus j’étais à l’envers mais vu l’état du truc…), du coup je suis allé au robinet me les cailler et me laver un peu ce que je pouvais, sachant que je visais un onsen pour le soir.
Je finis par partir, Robert a quitté son abri, et putain direct grosse montée comme la veille. Bon, je survis. En haut, au temple, il y a un téléphérique qui épargne la distance mais fait faire un détour, et vu que je devrais me taper 80 km de route 55 le lendemain et surlendemain, j’ai préféré prendre la route normale. Les marches me font mal au genou droit (où j’avais eu une double tendinite il y a presque un an), pour le calmer je lui promets un onsen et un massage le soir.
Plus loin, je pensais continuer jusqu’au Temple 23 sur la Route 55, mais le chemin a bifurqué, et je me suis pris une route de montagne dans la tronche, 4 km de plus que l’autre route mais j’ai cru ne jamais en voir la fin. J’ai l’impression que ma perception espace-temps se modifie… Vers la fin j’ai dépassé Jacques, un des deux Français avec qui avait voyagé Robert la veille, qui avait perdu son pote qui avait probablement pris l’autre route, la courte (pas con). Je l’ai revu plus loin qui avait fait du stop, c’était marrant.
Après avoir bien vu l’Océan Pacifique (presque la maison de Rebeca au Mexique mais il faisait pas assez beau), j’ai fini par arriver près du Temple 23 et j’ai fait quelques courses. Jambon et pain, pas de fruits secs disponibles mais des trucs à grignoter et une bouteille de soupe de légumes que je me suis farcie presque d’un coup (besoin de légumes, j’en mange jamais et peux guère en acheter). Ensuite, Temple 23 et… onsen ! Super agréable. J’y suis resté une grosse heure en alternant sauna, eau chaude et eau froide. Ma serviette est trempée mais ça valait le coup. Ah, et la balance me donne 61 kg mais je ne la crois pas, je ne pense pas que ce soit possible que j’aie perdu 2 kg en cinq jours juste en marchant.
Ensuite je vais à l’endroit pas loin que j’avais vu que la carte de Robert, soit un abri juste avec toit et bancs (presque sans murs), soit plein de bancs contre un bâtiment de la gare (salut papa). Va donc pour la gare, j’aime les murs et les bancs longs. Tant pis pour la lumière. Je mange plus que d’habitude, et pendant que je rédigeais ces lignes arrive une vieille dame, pèlerin elle aussi, qui me donne un okonomiyaki (elle a dû avoir pitié de moi, seul dehors). J’avais pas faim mais je mange, et comme prévu il y a du poulpe dedans (et du calmar). Ça n’a pas vraiment de goût et la consistance est celle d’une saucisse un poil pas assez cuite, rien de dégueulasse. Enfin bref.
6ème jour
- 13 avril 2013
Je me suis fait réveiller par Jean, le dernier Français que j’avais pas encore vu, vers 6h30. Il passait par là et a voulu vérifier à qui appartenait cette tignasse blonde. J’en profite pour me lever, les jambes encore endolories malgré le onsen de la veille, et je pars à 7h15. Dès les premiers pas, je sens mes muscles se décontracter, retrouvant leur rythmique habituelle, mais mon genou droit me fait mal. « Merde, je l’avais oublié celui-là. » Je continue mais rapidement je m’accroche à deux mains à mon bâton, ce qui est mauvaise. En général, quand ça arrive, c’est en toute fin de journée.
Je m’arrête un peu, et je reprends la route. Je réfléchis beaucoup. C’est a priori une tendinite, comme j’en ai déjà eu l’année dernière. Ça prend du temps à se soigner, donc me reposer un jour ou deux ne suffirait pas. Mais si je rentre, ce sera un échec, non ? Et je ferais quoi ? Retourner à Yamasa ? J’ai jusqu’à fin juin à attendre…
Je trouve une cabine téléphonique qui ne marche pas,k une autre pareil, tant pis, je peux appeler personne pour avoir des conseils. Je tente de faire du stop pour faire en sens inverse les quelques 3-4 km que j’avais parcourus depuis la gare pour trouver une cabine qui marche, mais personne ne s’arrête et heureusement je trouve rapidement un magasin. De là, je dérange Charles pour rien, j’appelle mes parents qui dorment, je leur demande leur avis, ce qu’ »on » leur dit, et au final je décide d’arrêter. J’appelle Chô-san pour lui annoncer la nouvelle, et un type qui partait du magasin m’emmène à la gare d’où je venais… à 1,5 km seulement. Gros problèmes, Renaud.
Là j’apprends qu’il y a eu un gros tremblement de terre vers 5h30 (j’ai rien senti) et que les trains ne marchent pas. Il y a là quelques pèlerins âgés qui ne voulaient pas faire les 80 km de route à pied et qui voulaient prendre le train, donc la vieille dame d’hier soir. Elle m’offre aussi une soupe, et un fruit qui s’appelle genre ginkan qui est comme une petite orange de la taille d’une tomate cerise, qui se mange entièrement (peau et pépin y compris), pleine de vitamine C. Fort heureusement un train dans mon sens arrive sous « peu », et je suis donc de retour à Tokushima vers 13h, avec plus de dix heures à attendre pour prendre mon bus de nuit. Je m’installe dans un Starbucks que je ne quitterai pas, m’achète des trucs chers mais bons, bosse beaucoup les kanji, et vais m’allonger dans la gare vers 22h quand Starbucks ferme. Là je reçois d’abord un jus de pomme par un mec bizarre puis un sac (posé sur le mien pendant que je me reposais) en o-settai, c’était vraiment appréciable. Une fille aussi qui était à côté de moi à Starbucks et qui avait un parfum ressemblant à celui de Camille et de Jianan (que j’ai eu l’impression de voir partout hier) est venue me parler quand je suis sorti, me demandant si je m’intéressais au bouddhisme (j’avais alors ma veste et mon bâton de pèlerin) et si je connaissais « Happy Science », une sorte de mouvement presque secte. Hmm… « Je me renseignerai. » Enfin bref voilà.
Après-propos
Me voici donc de retour à Okazaki, où Chô-san m’accueille gentiment et gracieusement. J’ai mal au genou droit, une petite contracture en haut du mollet gauche, les ampoules vont bien. J’ai probablement marché un poil trop vite, mais si je marche moins vite je suis frustré et c’est pas le but. Même si ça me permettrait de marcher plus longtemps. Aucun regret donc, je préfère garder deux genoux plutôt que d’en sacrifier un sur quel autel ? En plus j’ai eu un temps super tout le long, j’ai vu 23 temples sur 88, j’ai pas eu de problème de logement ni de nourriture, j’ai fait de belles rencontres (Fujii-san et Zikon), je me suis fait plaisir, j’ai fait 150 km et ai marché plus que jamais. Je sais maintenant que j’ai les genoux faibles, j’ai plus qu’à décider de ce que je vais faire maintenant. Retourner à Yamasa si les conditions sont réunies, faire du tourisme pendant deux mois (outch), rentrer plus tôt ? Je vais décider de ça rapidement. Probablement des cours particuliers pour rester à la résidence où je m’éclate bien, et prendre ensuite deux semaines pour visiter Tôkyô et Kyôto.
J’veux pas dire, mais je crois que les genoux, c’est Mousinier-Pompe.
Les articulations dans leur ensemble, c’est pas trop le fort de la famille
Problème de difficulté à plier, là aussi ?
L’orgueil ?
Moi je sais que quand je pense avoir raison, j’ai beaucoup de mal à me résigner, par exemple. Ou quand ce qu’on me demande ne me convient pas.
Je suis très fière de toi et ravie de tout ce récit !!
A quoi ressemblait la vue, du coup ? Tu ne nous as pas parlé des impressions visuelles que ça fait, tous ces temples et ces chemins dans la montagne…
Hello gnoufonk !
Merci pour ce long récit, merci spécial pour bruno Martinie!
Je pense que ça te fera de super souvenirs qd mm, je suis contente que tu ne vives pas cet arrêt prématuré comme un échec …
Si tu décides de rester pour profiter du Japon (qui sait qd tu y retourneras?), envisage le couchsurfing (cf Yuma a côté de Tokyo) voire le woooging. Deux solutions qui coûtent pas cher!
On suit tes aventures avec toujours autant de plaisir, Baj écouté mes lectures comme si c’était un roman palpitant !
Mais on sera ravis de te revoir des que tu auras décide de rentrer au pays des Robert jacques et jean qui râlent et réveillent les gens sans scrupules !!
Mon Reno, merci pour ce récit super intéressant, mais effectivement très centré sur les aspects pratiques. Comment sont les temples ? Lequel as-tu préféré ? Quelle atmosphère à l’intérieur ? Est-ce que ça t’a fait du bien de prier ? De te retrouver seul ?
Vraiment très intéressant, en tout cas. On dirait un Compostelle japonais, en plus dur, manifestement.
Par contre RENAUD TU NE FAIS QUE 61 KG ??????????????????????
Mais c’est dingue tu es super grand, ça va pas !! Tu fais presque le même poids que moi (bon ça fait supeeeeeeeeeer longtemps que je ne me suis pas pesée mais de façon générale j’oscille entre 57 et 61). Du coup tu dois être maigrelet !!! (moi pas, tu imagines bien…)
Eh mon reno mange, mange !! Après le Japon tu devrais aller dans une famille turque ou maghrébine, pour te remplumer un peu : promis, ça marche !
Sinon par rapport aux genoux, effectivement il y a une fragilité à ce niveau-là chez nous. Et tu as bien fait d’arrêter, parce que sinon tu aurais certainement été bon pour une opération. Encore une fois tu fais preuve de sagesse, tu es trop bien. Fière d’être ta soeurette (et paf les larmes aux yeux, non mais sérieux…).
Attention la future (chissà) naturothérapeute s’exprime :
Sachez donc tous, bande de ML, qu’en cas de douleurs articulaires, il faudrait mettre dessus de l’huile essentielle de Gaulthérie (ça calme l’inflammation).
Par ailleurs je vous conseille au passage de surveiller vos reins, qui sont à l’origine des douleurs articulaires ou des choses comme les tendinites.
En gros quand on a comme du sable dans les articulations (vous savez, quand on plie le genou et qu’on entend « crrrrc crrrrrc »), qu’on appelle des cristaux dans le langage naturothérapeutique, c’est qu’on a une fragilité au niveau des reins, car ce sont eux qui peuvent les dissoudre (ou les créer en cas de mauvais fonctionnement). Pour virer ces cristaux, il faudrait drainer les reins, mais en cas de vraie faiblesse, ça risque de ne pas suffire (jeûne, quand tu nous tiens !). Il y a des plantes, sinon. )
Au passage quand on a les reins pas contents, on peut aussi avoir une faiblesse au niveau de la vessie, et peut-être des muqueuses, aussi.
En cas de pb rénaux, il s’agit d’une mauvaise assimilation des protéines (éviter viande grasse, surtout), et un problème d’acidité (mmmmm le sucre et le lait !!!!!). Ce sont ces acides qui se transforment en sable et qui vont nicher dans les articulations.
Pour s’en débarrasser, un super truc : le sauna / hammam (en buvant bcp d’eau) : la chaleur va dissoudre les cristaux qui vont sortir par la sueur.
Légumes copains du rein : chou (cru c’est mieux), pissenlit, oignon (cuit c’est top –> coooooooool !), poireau (+ racines de fenouil ou cheveux de maïs).
Plantes médicinales du rein (pour drainer) : aubier du tilleul, bouleau, pissenlit, cassis.
Si pb urinaires : bruyère, queues de cerise, piloselle.
Concernant la tendinite elle-même :
- boire bcp d’eau pendant l’effort (éviter que les reins travaillent à vide)
- éviter viandes grasses et rouges + sucres (mauvais sucres surtout : le miel et la stévia, ça passe).
- pas de laitage (lactOSE = sucre du lait)
- manger des oméga 3 : poissons gras, huile de colza ou de noix, etc. qui sont anti-inflammatoires. Le but étant de réduire les oméga6 (pro-inflammatoires) et avoir un ration équilibré entre les 2 (1/4 oméga3/6) et non pas (1/20 comme c’est souvent le cas).
- sur le moment : cataplasme d’argile (l’argile attire à elle les cristaux) pendant 2 à 3h chaque jour
- bains d’eau salée (fraiche si tendinite récente – chaud et très salée si ancienne)
- HE de gaulthérie, laurier noble, hélichryse (anti-inflammatoires et antalgiques). « Pour encore plus d’efficacité, diluer vos huiles essentielles dans une huile végétale d’arnica ou de millepertuis. »
La suite n’est pas de moi :
« - les aimants sont une alternative naturelle très efficace contre la douleur, et sont très bien adaptés pour soulager les tendinites et rééquilibrer l’organisme. il faut les placer rapidement de part et d’autre de la zone douloureuse, et les garder 8 à 10 jours.
- l’Harpagophytum est une plante dont les propriétés anti inflammatoires et antalgiques ont été mises en avant dans plusieurs études, elle est tout à fait adaptée au traitement des désagréments articulaires et améliore la mobilité des articulations.
N’oubliez de consulter votre ostéopathe, certaines douleurs peuvent être liées à des problèmes du dos.
La réflexologie plantaire donne d’excellents résultats sur les tendinites, l’inflammation diminue, l’irritation se calme, sans compter qu’une séance améliore très nettement la détente musculaire, favorable à un bon rééquilibrage de l’organisme. »
Voilà les amis ! Désolée si je vous ai gavés (mais sans sucre et végétarien)
Tchong wo ta !
Mon Reno je t’aime <3
Salut, Saint-Galmier,
Tenant compte des recommandation de la Loune, et après contrôle au bandonle, j’ai mis une goutte d’huile essentielle de Gaultérie sur la bande d’argile que nous te consacrons depuis ton coup de fil. Tu peux considérer donc que ça va aller mieux.
Pour la période qui vient, si tu ne trouves pas de petit boulot, tu auras peut-être intérêt à anticiper ton retour (le surcoût sera peut-être moindre que tes frais de séjour et de bouche, non ?) ? Vois et dis si on peut quoi que ce soit.
Merci pour le long récit, que je me vois mal narrer par le menu à Douchka : il y en a pour une heure, et ça va nous bouffer un épisode de Dexter, ça ! Tolbiac commence à travailler la musique du générique à la clarinette, pas simple…
Je m’arrête là, par ce que je suis crevé (36 km de VTT, je te dis pas les jambes et l’arrière-train…) Et partout ça sentait bon les barbecues dans les jardinets (what is your favorite colour ?) et on est rentré peu avant 14h, lessivé (on est du singulier, donc pas de s, mais je reconnais que c’est plus que tentant).
Cet aprème, concert pour Tolbiac avec sa clarinette et son orchestre, à la Tour. No siesta, tanto piso !
Bâille, Mister G’nou ! Si tu as mal, dis seulement, Ach, mein Gott, et ris…
Décidément il est temps que je me repose aussi. Ciao, Patatras !
P.
@G: La vue était jolie, ça m’a rappelé les montagnes françaises et roumaines. Des montagnes partout autour, sauf quand il y avait l’océan of course, de grands arbres, plein d’arbres, un peu de pierres et des petites statues partout. Les temples étaient plus ou moins impressionnants mais tous similaires, certains avec de belles couleurs rouges, d’autres avec plutôt de la roche, d’autres beaucoup d’arbres, assez variés.
@D&P: Demain j’aurai plus d’infos mais je devrais pouvoir rester deux mois en n’allant qu’une heure par semaine à l’école…
@A: J’étais fatigué, je priais pas vraiment, je pensais aux gens en étant au calme. Je pensais à eux aussi en marchant, mais c’était un poil différent. L’atmosphère n’est pas vraiment différente dans le temps et à l’extérieur. Souvent il y avait des groupes de vieux en bus qui font tous les sutras, je commençais à avoir la rythmique et la prosodie en tête, à la fin. Ça m’a pas fait spécialement de bien d’être seul, mais c’était bien pour réfléchir. Je me suis jamais ennuyé, vu qu’il y a toujours des trucs à (tenter de) lire ou auxquels réfléchir (logement, nourriture, gens). Et je ne fais pas 61kg mais 63. J’ai beaucoup mangé aujourd’hui, j’ai dû repasser à la barre des 63kg. Je devrais reprendre sans trop de soucis les deux kilos qui restent, mais je forcerai pas le destin.
Le déterminisme du genou ?
Je lis ça et là qu’une faiblesse du genou existerait dans la famille ML. On parle aussi de dureté d’oreille, de bégaiement du côté Cames,e tc.
Dans ma Presse Galactique du jour, je trouve ceci que je vous livre en version abrégée :
« Jusqu’à il y a peu de temps encore, la science croyait que les gènes et notre hérédité déterminaient notre vie. On croyait que nous avions des prédispositions à certaines maladies physiques aussi bien que psychiques. Des chercheurs ont maintenant démontré que ce ne sont pas les gènes qui nous influencent, mais que c’est le contraire. Ce sont les gênes qui sont influencés par l’environnement dans lequel ils se trouvent (au sens large d’environnement physique, émotionnel et psychique). Ainsi, il n’y a plus de déterminisme provenant de votre hérédité (sauf dans un pourcentage de cas très minime) et le milieu dans lequel vous êtes immergés peut altérer vos gênes et votre ADN.
(…) Aau fil du temps, vos cellules ont emmagasiné un tas d’informations qui n’était pas là lors de leur création. Ces informations proviennent de différentes sources telles les croyances négatives, les émotions refoulées, le stress, les peurs, l’ingestion d’aliments et de boissons transformés, artificiels, synthétiques et sans force de vie, les drogues, la cigarette, les médicaments, la pollution et ainsi de suite.
Toutes ces situations, provenant en grande partie de votre histoire personnelle, ont contribué à altérer ces facultés d’auto régénération et d’autogestion en ajoutant à vos cellules des informations erronées ou incompréhensibles par elles. Ces informations additionnelles entrent donc en conflit avec le programme initial de gestion des cellules. C’est ce qui explique pourquoi les cellules d’un humain adulte ne savent plus comment traiter tout cela, car l’information qu’elles contiennent n’est plus en harmonie avec les principes universels de la création – et c’est la cause de nombreux déséquilibres physiques. »
Et puis on indique des méthodes énergétiques qui permettent de repérer l’organe où se niche l’info erronée, et de la traiter.
DONC RIEN N’EST FIGÉ ! AUCUN CAS N’EST DÉSESPÉRÉ !
Sur cette note d’espérance, je vous présente mes respects du soir.
Dans mes cours, ils disent aussi que l’hérédité n’est pas une fatalité (sauf cas lourds). Généralement en 3 mois on peut changer le terrain et corriger l’orientation que prend le corps… (pas sûre d’être bien claire)
Titoune je viens de lire ta consultation de naturopathe, ça m’a bien intéressée, tu ne l’auras pas écrite pour rien !
Papa, ce dont tu parles, c’est le propre de l’épigénétique, si j’ai bien suivi.
Enfin pas exactement, mais ça explique en effet que les gênes sont influencés par l’environnement.
Merci a tous les Determines-du-Genou,
A Renaud, tout d’abord, pour son esprit d’aventure, ainsi que son gout et son application a raconter ses peregrinations.
Et a tous les autres pour votre science naturelle et infusante. Je retiens notamment l’huile… essentielle!
Et je retiens aussi la dissolution des cristaux dans le Hammam. La ou je me trouve (Sud de la Mediterrannee) c’est une forme de naturotherapie (l’ai-je bien dit?) dont j’aurais tort de me priver.
Je vous embrasse toutes et tous.
Patrick
ps pour Renaud: et apres?
Après.. mystère et boules de geisha… Je rentre fin juin en France et je continue à chercher du travail, où que ce soit (hors Japon et Mexique). J’ai quelques pistes, je tente, on verra bien. Mais j’ai tendance à l’optimisme.
Excuse-moi, je ne suis pas tout en temps reel (euphemisme) et je n’ai pas bien compris d’ou vient la piste Hongroise. C’est surement un beau pays, mais je dois dire que l’investissement que constitue l’apprentissage de la langue me parait, si tu me permets , assez cpmparable a l’ascension du Mont Fuji… Bon peut-etre que je choisis mes metaphores de maniere hasardeuse… (le choeur: « Eh Dugenou… »).
Mais… mais … je me souviens qu’a Budapest il y a le fameux hotel Gelert, avec ses bains qui doivent aussi etre afficaces contre la cristallisation.
Dis-moi quels sont tes projets. Je ne te souhaite pas forcement d’etre toujours par monts-et-vaux comme moi depuis quelques annees, mais si tu as besoin d’un billet d’avion je serai content de pouvoir subventionner ta vie de jeune errant.
Je t’embrasse
Pour la Hongrie, c’était une annonce diffusée sur les principaux sites d’annonces de Français Langue Etrangère à laquelle j’avais postulé, voilà tout
Mais j’ai été refusé, ils demandaient un Master 2 et pas un simple Master 1 (contrairement à d’autres). Je continue donc à chercher.
Je n’ai plus de projet, ni de rêve. Je pense qu’avant que de nouveaux me viennent, il faudra que je me sorte Rebeca de la tête et du cœur, ce qui me prendra un sacré bout de temps, vu comme c’est parti (on a rompu de manière « apaisée » fin mars).